Depuis plusieurs mois, j'ai repris un travail avec une diététicienne. Je n'ai jamais eu de problème à dire que je voyais une psychologue ou un psychiatre, mais alors aller chez une diététicienne c'était un tout autre registre. Il faut pour ça avouer qu'on a un problème avec la nourriture, qu'on a un problème avec son poids, qu'on a un problème avec ses comportements alimentaires. Et ce n'est pas évident, pour moi en tout cas.
Sonner à l'interphone de la diététicienne , c'est d'ailleurs toujours une petite épreuve dans ma journée où je me dis "
Bordel, j'espère que personne ne va voir que je sonne chez une diététicienne. Parce que du coup, ils vont me regarder, voir que j'suis grosse & me juger." ... C'est une peur totalement irrationnelle, et complètement infondée. ( Je ne regarde pas les gens de travers dans la rue quand les gens sonnent chez le dentiste en pensant qu'ils ont les dents pourries. )
Bref. Du coup, je vais chez la diététicienne. C'est dit. Voilà. J'y suis allée parce que j'ai réalisé que j'avais pris énormément de poids l'année dernière, sans jamais vraiment réagir. J'en voyais une il y a quelques années, mais c'était un peu une amie, du coup je ne payais plus la consulte, & on passait l'heure à parler de son divorce ... Du coup, il n'y avait plus aucun intérêt.
Je suis donc retournée au début d'été 2015. Ma mère m'avait proposée d'aller chez Nature House avec elle. Je n'avais pas du tout envie de recommencer un "régime", je voulais autre chose, je voulais faire un travail en profondeur autour de ce symptôme que sont les troubles alimentaires depuis tellement d'année. J'ai refusé tout en m'engageant à commencer un vrai travail, et me suis mise à la recherche d'une diététicienne qui a une vision globale du problème, qui prend en compte tout l'aspect psychologique autour de l'alimentation, etc.
J'ai vu des psychologues, des psychiatres, des diététiciennes, des hypnothérapeutes, etc et j'ai un peu pris l'habitude de raconter mon historique médical & "personnel" en pilotage automatique. Mais là c'était différent, j'avais vraiment envie que ça marche, et ça m'a beaucoup remué à nouveau de parler de tout ce qui a attrait à l'alimentation, mais aussi à la souffrance personnelle depuis mon enfance. Anorexie, boulimie, etc.
Et je me suis posée depuis pour réfléchir avec elle, et je me suis dit que oui c'était normal d'en être là où j'en suis avec mon alimentation après des années de privation, des années de régime yoyo, des années de galère avec mon corps. Aujourd'hui, je ne supporte plus la privation, la sensation de me dire que je ne pourrai PAS manger tel ou tel aliment si j'en ai envie. ça m'est presque insupportable.
Je repense à ces années de privation que je m'imposais ou que ma petite maman, qui croyait bien faire, m'imposait quand le médecin lui a dit que j'étais une petite fille en surpoids . Et je repense à cette année dernière où je n'ai juste pas pu, je n'y suis pas arrivée, j'étais désemparée face à l'alimentation. Je sais comment manger hein. La diététique n'a pas ou peu de secrets pour moi. Je me suis beaucoup renseignée sur tout ça. Mais j'avais le sentiment de n'arriver à rien. Avant de comprendre.
Et si je vous en parle ici aussi, c'est peut-être parce que derrière votre ordinateur vous vivez ou avez vécu la même chose. Après des années de privation, vous vous sentez nulle de ne pas réussir à tenir un régime quand vos amies enchainent les régime Dukan ou hypocaloriques et perdent du poids à la vitesse de la lumière. Vous vous sentez nulles, inférieures, et vous ne comprenez pas pourquoi vous manquez de volonté. Pourquoi ? Parce que c'est NORMAL. Parce que ce n'est pas juste votre mental qui n'en peut plus. C'est aussi votre corps qui fait de la résistance, qui résiste plus difficilement à la moindre petite privation, qui a du mal à ressentir les signaux de faim et de satiété. C'est aussi physique et métabolique. Après des années de "maltraitance" de son corps, après des années à lui mentir, à lui dire qu'il n'a PAS besoin de manger pour avancer, à le faire vomir, comment peut-on imaginer une seule seconde pouvoir le contrôler toute sa vie ? Mon corps était aussi paumée que moi je l'étais. Et le vôtre sans doute aussi si vous êtes dans le même cas que moi.
Alors il faut souffler, respirer, se regarder avec bienveillance. Accepter de demander de l'aide, et ne pas en avoir honte. Savoir ce que l'on vaut. Se dire aussi qu'on est beaux tel qu'on est. Parce qu'on l'est. Vraiment. Et puis arrêter de se comparer à la copine, la voisine ou la cousine ou la copine de votre ex'. Parce que personne n'a vécu ce que vous, vous avez vécu. Et arrêter de se dire que c'est "dommage" d'avoir repris tout le poids perdu, arrêter de se flageller. Si on a repris du poids, c'est qu'on devait le perdre autrement. Et ce n'est pas grave. Et ça va aller. Et on saura ... pour la prochaine fois.
Apprendre à manger, c'est compliqué. Vraiment. C'est pas le "rééquilibrage alimentaire" à la mode des dernières années, c'est pas 5 fruits & légumes par jour, c'est pas 3 repas par jour et pas de grignotage. Non, c'est vraiment très compliqué. Mais ça, j'en parlerai peut-être dans un prochain article si ça vous intéresse.
Ma diététicienne pour les lyonnaises : Aicha Gril Andas